Tribune de Norbert Neuvy

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Interdire les sachets de nicotine, c’est condamner à mort la réduction des risques.

En signant le décret du 5 septembre 2025 interdisant les sachets de nicotine à compter du 1er avril 2026, le gouvernement français vient de faire un choix lourd de conséquences : refuser à des millions de fumeurs une alternative efficace et sans fumée.

Je suis un ancien grand fumeur. J’ai commencé en 1991. J’ai tout essayé pour arrêter : patchs, volonté, prières. Rien n’y faisait. En 2008, c’est la cigarette électronique qui m’a sauvé. Puis en 2018, j’ai pu arrêter complètement la vape grâce aux sachets de nicotine, un dispositif sans tabac, sans combustion, discret, et surtout beaucoup moins nocif. Je ne suis pas une exception : je suis l’un des milliers de Français à avoir trouvé, dans ces alternatives, un moyen de sortir du tabac.

Ce décret ne protège pas la santé publique : il la condamne.

Le vrai danger, c’est le tabac. Pas la nicotine.

La nicotine est addictive, certes. Mais ce n’est pas elle qui tue : c’est la fumée. Ce sont les goudrons, le monoxyde de carbone, les dizaines de substances cancérigènes libérées par la combustion du tabac. Interdire des produits sans fumée, c’est un contresens médical, scientifique, éthique.

Les sachets de nicotine ne sont pas une “mode venue des réseaux sociaux”. Ce sont des outils de réduction des risques, largement utilisés dans les pays nordiques, où les taux de tabagisme ont chuté de manière spectaculaire. En Suède, grâce à une politique d’accès aux alternatives, le tabagisme est en voie d’extinction. Et le pays affiche le plus bas taux de mortalité tabagique d’Europe.

Une décision idéologique et isolée

Ce décret fait de la France est un des seuls pays européens à interdire purement et simplement ces produits. Il ne s’appuie ni sur une concertation scientifique sérieuse, ni sur une analyse d’impact sur la santé publique. C’est un choix idéologique, paternaliste, punitif.

Pire : l’OMS elle-même élargit le champ de la lutte contre le tabagisme à toute forme de consommation de nicotine, y compris celles sans fumée, sans tabac, sans combustion. Cette dérive sémantique est en train de saboter la finalité même de la lutte antitabac : réduire la mortalité.

En croyant interdire “un produit de plus”, on supprime une option de moins pour les fumeurs. Et on prépare le retour de la cigarette dans les poches de ceux qu’on prive de solution.

La prohibition ne marche pas. L’information, si.

Ce décret est une triple erreur :

  • Scientifique, en confondant nicotine et tabac.
  • Sanitaire, en privant les fumeurs d’alternatives.
  • Politique, en s’isolant des bonnes pratiques européennes.

La prohibition ne marche pas , la réglementation si ! Et l’histoire l’a montré : la prohibition crée des marchés parallèles, de la désinformation, et un recul des politiques de prévention efficaces.

Il est encore temps de reculer.

Je n’appelle pas à un laisser-faire. Je demande un cadre clair, responsable, transparent. Interdire l’accès aux sachets ? Non. Mais les encadrer, oui. Couper l’accès à l’alternative, c’est renvoyer les fumeurs vers le tabac.

Monsieur le Premier Ministre, vous avez entre vos mains un outil qui sauve des vies. Ne le détruisez pas.

Retirez ce décret. Et engagez enfin un débat public sur la réduction des risques.

Par Norbert Neuvy, ancien grand fumeur, co-fondateur de Nicotine World